dimanche 5 février 2017

amitié





amitié
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Tu m'auras connu en cours de route. Je ne garde pas d'amis de longue date, je ne sais pas ce que c'est qu'un vieil ami.

Même ma famille. Quand j'ai accouru demander une écoute de ma tante nonne, fine et spirituelle, ma mère a intercepté la communication et m'a sommé d'interrompre tout échange au niveau du mental avec elle sous prétexte que je pouvais heurter sa sensibilité. Ma tante travaille ou a travaillé, en tant que missionnaire, avec les plus pauvres, elle a accueilli de femmes battues, des alcooliques, et j'en passe pour pas faire une parade.

A ce point, les rapports que je garde avec eux ressemblent beaucoup au sourire aigre des compagnons d'université qui me croisent un jour malencontreusement. Mais ça arrive peu puisque je ne me souviens pas de leurs visages, ni de leurs noms ou surnoms.

Il y en a certains qui font un grand scandale de bonheur, de me retrouver après tout ce temps, et qui me laissent raide quand ils se souviennent un peu de ce que je n'ai arrêté de penser d'eux.

Puis il y a l'ambivalence, je suis déjà un mauvais fils, mais gardons les apparences, même des petits rideaux sur nos coeurs en charbon, même j'ai la faiblesse de l'aveu, à force d'essayer de parler de quelque chose au milieu de leurs machins de manger ensemble, d'aller cueillir des mûres... je reste avec mon père, à qui les ronces des mûres et le chapeau de paille dépassent aussi un peu, et nous parlons littérature. Trop de dispersion, Manuel. Mais parfois il trouve de bonnes choses. Mon père je le sens loin, et peut-être ai je fait le deuil avant qu'il ne meure, puisque je pense à ces conversation sous le chêne comme je pense à la compagnie de mon chat, quand je le revoyais après ses périodes de duelliste et d'accouplements furtifs qui l'éloignaient pendant des mois.

Tous deux nous peignons. Nous avons à cet égard ce manque de communication si typique des peintres. Tous les peintres veulent garder de ses collègues la première image reçue, et quand ça arrive dans la famille, c'est une régression nostalgique qui nous accable. Il ressort mes cahiers d'avant le lycée et nous faisons une farce à ma compagne. Je lui dit que j'ai passé la journée, pendant la cueillette des mûres, à travailler des idées au feutre de couleur, sur un cahier. Elle est émue, j'ai peur, devant la volonté de faire adulte de mon enfance, qu'elle bascule et qu'elle pose des questions enthousiastes. En cours de route, aussi pour elle, donc.

L'artisticité sociale est sous-entendue par la Loi. L'abandon de la calligraphie latine par l'auteur a été accomplie par Gutenberg et par les copistes, mais à présent l'on doit faire face à l'improvisation typographique des masses, et l'aristocratie n'a jamais été suivie par ses sujets en tant que masse, mais par un tissu social organisé. Or, l'entreprise ose entreprendre une nouvelle aristocratie sans contreparties.

J'attrape un peu de mon courrier :

1)

bon

j'essaie de communiquer par l'art

je défais la tapisserie du ridicule récit que j'étais en train d'arrondir

tu m'envoies peindre

peinture de dimanche

comme quand tu dis "aller à l'essentiel sans passer par l'esprit"

j'apprends beaucoup

pourquoi ?

âme morbide occasion rejette

mais aussi d'autres choses

ou plutôt d'autres choses

Manuel


2)

Chère amie,

excuse moi d'être accroché comme-ça

on dirait que mon cas va de pire en pire

mais j'avais besoin

est-ce que je peux m'en passer maintenant ?

le mieux c'est de trouver l'équilibre dans l'ambiguïté

c'est ce qui ressemble le plus à l'innocence, arrivés là

qu'est-ce que tu en penses ?

fumée...

Manuel


J'ai acheté un livre de Malaparte quand j'ai exposé au Maroc, ça va faire deux étés, à côté de ma galerie il y avait un libraire de livres usés, ou en tout cas vieux et arrivés là. Il avait l'air moqueur à me voir ennuyé fumer à sa porte et jeter des regards sur les livres en calculant la petite monnaie sans pouvoir vraiment cerner mon affaire à l'achat. La galerie était la plus importante de Rabat dans le domaine du marché privé, avec plusieurs employé(e)s et plusieurs étages, la librairie en revanche était un cabinet sans autre éclairage qu'une tulipe à la caisse centenaire et le soleil à la porte, où s'entassaient jusqu'au plafond des liasses et des volumes. On dirait en même temps qu'une humidité obscène pourrait abîmer les livres, et qu'au contraire c'était tellement sec et chaud que le papier allait s'effriter ou que derrière une de ces colonnes de confidences réservées aux étudiants francophones l'on pourrait voir une momie ou encore une porte. Du reste je connais mal Malaparte, puisque le livre est à son tour resté en Espagne à moitié de trajet, l'ayant un peu feuilleté et déposé parmi les autres "otages" de ma bibliothèque grenadine. Mais je vois ce que vous voulez dire...

Toujours restons au féminin. Qui est ma compagne ? A part une autre artiste à part entière ? A part une femme intelligente et avec ce penchant pour la solitude que la rapproche de moi ? A part d'être un visage à étudier pour ma peinture, peut-être un corps ? Et quel corps, toujours... Un dos, un devant à triple pli dans la finesse indienne, qui stylise les bourrelets ? Une gorge, où je dois halluciner toujours une tarentule que caresse la naissance de la voix ? Des jambes que je trouverai toujours magnifiques ? A part quelqu'un aussi peut-être en cours de route, mais dont j'écoute les soucis et je me conforme de savoir ce qui vient à propos ?

Et qui sont les autres femmes ? Je pense que là l'on touche quelque chose de dur. Puisqu'elles ne peuvent rester désincarnées pendant des mois et des mois. Elles deviennent folles, dans mon imaginaire destructeur. Le noyau dur de ma paranoïa est de croire que tous les signaux marqués "love" me sont adressés, et surtout de penser que je suis à l'origine de toute la folie du monde féminin. Je séduis, j'abandonne, je suis jaloux. Les trois stades de l'amour de Dieu que j'ai produit par l'excès, comme un volcan produit la lave. Je pense que l'amitié fait ce cycle purificateur, sacrificiel. J'ai déjà parlé du corps juvénile du sphinx, et de son suicide. Je reviens aux deux courriers là-dessus. J'attrape le mot de passe "amour" (Ame Morbide Occasion Rejette) et "ambiguïté", ainsi que le vieux mot de l'innocence. Non, je ne peux dire qui sont les autres femmes. Cela serait de la littérature, et moi je fournis des documents joints à ma peinture.

Le peintre peut se permettre une surabondance interdite au poète.

Oui, voyons, qui sont-elles ? Des corps aussi, portant chacune ou pas tel ou tel stigmate, tel grain de beauté ou teint de cheveux. Des corps, qu'on peut connaître comme on connaît de par les gravures de Palladio le Panthéon d'Agrippa ou la Basilique de la Paix. Comme on sait qu'une chaise est une chaise. Sans pour autant nous asseoir. Mais des corps traversés par des flux de langage et producteurs de langage. Imaginez. Je fais rentrer dans mon monde pulsionnel, outre mon couple, et en priorité par égard des rares amis hommes, des femmes qui pratiquent le même métier que moi, l'art. Mon donjuanisme est ma façon naïve de pratiquer l'émulation. Je n'ai trouvé une autre façon de me référer dans mon travail à leur multiple influence à la Tristan et Yseut, ou platonique (qu'à elles, femmes de la Réalité, les rebute chez moi comme un symptôme sénile de bondieuserie), que les bicéphales qui peuplent mes dessins et peintures. Ce qui était une idée pour un tableau à thèse est devenu un acte figuratif compulsif, obsessionnel comme peut l'être l'hygiène chez d'autres. J'en fais de plus en plus de femmes à deux têtes, des corps à la chair bleu cobalte ou polychrome, et ça se passe aussi dans les dégrées des métaphores et des synecdoques, dans la fourrure du langage qui n'est jamais si bien cousue que sur un corps escamoté.





Cuánto tiempo se quedan los números
en el reloj, cuánto tiempo la flecha

Difficiles à suivre, les Renoir, père et fils, peinture et cinéma, si proches de nos premières expériences esthétiques. Cette tension dramatique du Carrosse d'Or, une dorure faite de lumière sur une salle obscure ou dans le clin d'oeil d'un appareil privé, ce plaisir jusqu'aux lèvres rougis de la contemplation d'enfants, filles et femmes. Le rideau de l'impressionnisme, qui semblât démocratique et accessible au peintre dominical et à l'homme sans espoir, les dérobe à notre vue, et nous ne suivons plus. Pourquoi se distraire aujourd'hui aux couleurs ? Un nouveau mirage les convoque et nous donne l'illusion d'être peintres à nouveau, déçus que nous sommes d'en être Renoir à l'heure du blanc et noir. La Lune à mis un cil de Rimmel sur son regard de folle, elle commence à décroître, sa lumière demande des lavages au café, c'est l'heure du papier, pour le nouveau mirage, déjà connu et revu ce soir chez Thaddaeus Ropac. Si le papier, si la couleur, si l'abondance de symboles, la générosité des petits visages qui nous encouragent, si l'appareil honnête de la main semblent nous indiquer le chemin, le rideau nouveau d'un casse-tête, par le truchement de cadres complexes, par le jeu d'un esprit insupportable, nous dérobe le Francesco Clemente que nous croyons connaître et peut-être nous avions connu, et nous ne pourrons plus le suivre si l'on n'est pas renards. Une procession d'ensorcelés barrait le passage, et le peintre et le public ne pouvaient pas sortir de l'oeuvre d'art. Visages barbouillés de blanc intense comme dans les nuits de l'iboga ou d'autres cultes syncrétiques. Le casse-tête, comme tout jeu, est cruel et pour un artiste de papier, faute de nous faire devenir des lions ou des panthères, nous devons y suivre la voie du rôdeur et devenir un peu renards. Peut-être pourrions nous suivre les traces de cette peinture partagée en fragments, peut-être trouverions nous la notre, et c'est de cela qu'il s'agit. La Lune fume avec moi à la fenêtre et me dit "c'est à toi de le dire, il n'y avait pas Nabe, si semblable à toi (physiquement, coiffure, lunettes, veste), ni Matzneff, trop occupé, il y avait une foule et personne n'a pris les grains de raisin, dessinés avec la vigoureuse couleur de la maturité de style", et moi qui réponds à la Lune "ils sont pas mûrs pour moi".

L’empereur dans le flaque d’urine, l’artiste ou président de l’imaginaire finira toujours phagocyté par son anus. L’on parle peu sérieusement toujours et seulement en domaine psychanalytique, jamais dans le discours de la démocratie d’architecte, de la folie cachée par l’éducation bourgeoise dans l’anus de ceux et celles qui veulent parvenir au pouvoir et au rôle décisionnaire. L’artiste comme un empereur peut dans la Fin de l’Art qui s’opère au XXe siècle prendre toutes les décisions, même si cela n’est quelque chose qui lui sera accordé par le succès ultérieur.  L’artiste est tyran et spéculateur parce que la propriété ne soit que du Nom est tout comme la propriété privée le fruit du vol et de l’expoliation. Et les pratiques marginales du graffiti ou de la libre pensée ne sont que spéculation soit vol. Alors il faut se faire un propos, si l’on prend les rennes de la réalité ou de l’imaginaire et c’est pour cela que l’Histoire abonde dans l’abus et le n’importe quoi, mais si le rennes sont prises par le peuple, ne soit que pour arrêter une course folle et descendre ensuite…

Il promenait sa main sur la nuque d’elle et pensait elle a des traits indiscernablement picniques, peut-être même pas un picnique dans sa famille. C’est là que la statuaire universelle, des gargouilles gothiques à celles de l’Amérique Précolombienne ou les Bouddha d’Extrême Orient dépassent toutes les accurances de système des anglosaxons, ils ne peuvent même pas se représenter avec de traits communs ou universels, si ce n’est le smiley. Mais c’est qu’elle est enfouie à jamais dans ce dernier regard direct, avant de partir du bar.

je peux avoir des microbes, comme n'importe qui qui prend le métro
mais j'ai pas fait l'amour à d'autres
mais c'est d'accord, ça suffit
si tu comprends les angoisses de Patricia explique moi
9:23
tu es une des personnes les plus gentilles que j'ai connu, prend toujours soin de ta personne et aie confiance parce que l'amour est possible, au revoir

Je vous avoue que je sors d'une rupture, j'ai 46 ans, un fils de 18 qui n'habite pas avec moi, et mes conditions actuelles sont précaires mais encore vivables, et me suis inscrit sur meetic pour avoir un peu de vie, j'ai une conversation littéraire (je suis peintre mais pas mutique toujours )
Mon mobile est le 06 61 31 59 94 et je voudrais bien vous inviter à un café à mon atelier, car j'ai lu sur votre profil que vous fumez et que vous aimez les chats (j'en ai pas mais j'aime aussi et je fume beaucoup, je bois pas, en revanche )
je suis andalou, parisien depuis longtemps

ma personnalité allait bien jusqu'en 2011 mais je me remets, c'était la révolution en Espagne et je suis un peintre libertaire à Paris depuis 2004 et bilingue
j'aime les discussions littéraires entre fauchés qui ont lu


j'attends une femme de gauche, freudienne, qui aime poser, qui soit pas totalement blanche si possible, en tout cas pas catho et je rêve d'un amour où je puisse exprimer la tendresse naturelle

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